Donner et recevoir. Cet adage, Sandrine Quétier le partage sur scène, aussi bien quand elle chante ou donne la réplique, « au théâtre et dans la musique, on est dans une partition. C'est un immense espace de liberté. » D'espace, il est question dans l'enregistrement de son premier album, fabriqué en partie dans une maison de maître du 19ᵉ siècle et une atmosphère cosy. Quétier (son nom d'artiste musical) envoute par sa voix, un album éclectique, entre chansons intimistes, escapades presque disco et morceaux rock, « la musique qui m'a toujours emportée. » Rencontre.
« Sandrine, votre premier album Hard to follow est dans les bacs et sur toutes les plateformes de streaming. Quel est le fil rouge qui relierait les dix titres ?
Ce sont des sonorités 80 avec une basse très en avant. Les morceaux explorent tout l’univers du rock et le choix des instruments, des synthés créent une unité à travers l’album.
Dans quel environnement avez-vous été pour la confection de cet album ?
Il a été fait en deux temps. D’abord, toutes les prises d’instruments ont été faites au Disco Casino, à Rennes. Pour les voix, nous ne voulions pas d’un studio fermé, en sous-sol. On a découvert le Paraphernalia Studio dans un tout petit village à côté de Niort. C’est une ancienne grange au milieu des champs, avec de grandes baies vitrées et une vue sur l’extérieur, ouvert sur la vie. On était au milieu de la nature dans une ambiance à la fois perdue, seule et très cocoon. Le titre Mountains a été enregistré au réveil, vers 6h du matin. Parfois, on se reposait la journée et travaillait le soir pour avoir un grain de voix différent. Des prises de sons des oiseaux ont été faites et on les entend dans certains morceaux. Nous avons eu une grande liberté artistique au cœur de cette île de verdure.
Comment s’est passée votre collaboration avec le réalisateur et producteur James Eleganz ?
Ça faisait un moment qu’on voulait travailler ensemble. Nous sommes dans le même label. J’aime son univers, je suis allé le voir en concert et James est venu sur mes précédents projets avec Molly Pepper. On a commencé par se faire un ping-pong de paroles jusqu’à ce que ZRP propose la production de mon premier album d’artiste. On travaille un peu de la même manière, on est des stakhanovistes. Au mixage, à Bruxelles, nous avions les mêmes idées sur les pistes à garder ou non. Ça a été un travail agréable et fluide.
Quatre titres ont leur clip (réalisés par Leïla Macaire et Jonathan Perrut) sur votre chaîne Youtube. Quelles ont été vos indications visuelles et artistiques ?
No Fear, c’est une déambulation dans un taxi, une prise de conscience qu’on peut assumer ce qu’on est, avec des images de gouttes d’eau qui tombent. On voulait quelque chose de très beau pour ce premier clip. Walking on the Wire en est la suite avec des références comme Cassavetes. Pour Shoot Again aussi, il y a plein de clins d’œil cinématographiques, notamment à Nastassja Kinski et son fameux pull rose. C’est un titre pour les femmes, pour qu’elles se libèrent d’une emprise. Enfin, la thématique d’American Psycho est en lien avec le livre de Bret Easton Ellis. Ma chanson parle de la dualité en chacun d’entre nous, comment quelqu’un d’ordinaire peut se révéler extraordinaire dans ce qu’il a de meilleur ou ce qu’il a de pire (un serial killer en l’occurrence). Dans le clip, on suit un jeune homme à la vie plutôt classique. Il est toiletteur pour chiens et le soir, il se transforme en allant faire des compétitions de tuning et de drift. Tout est bon pour vivre son rêve et pour essayer d’aller encore plus loin, de se frotter à ses idoles, même si lui est un petit peu filou (rires).
Que raconte Shoot Again, plus précisément ?
C’est l’histoire d’une cam girl, de ces femmes qui se déshabillent devant la caméra et répondent à des demandes de la part d’hommes, en général. J’interprète une galerie de personnages qui répond à chaque fois à une injonction de la société : la sportive pour garder la forme, la femme sexy mais aussi parfaite cuisinière, la femme d’intérieur mais aussi un peu dominatrice. Jusqu’à ce que toutes ces femmes, sous emprise physique ou psychologique, retournent la situation et décident de dire stop afin de reprendre possession de leur intégrité.
My Kingdom est un titre sur les rêves d’enfants. Garder cette part d’enfant est important quand on est artiste ?
Je dirais plutôt l’accès à la rêverie. Ce titre parle du champ des possibles quand on a huit, neuf ans, qu’on est dans les murs de sa chambre et qu’ils sont infinis. La chambre est le royaume de l’imagination. À cet âge-là, on peut être tous les métiers, on peut être ce qu’on veut. J’ai essayé de me remettre dans ma peau de petite fille, chez mes parents, à m’imaginer être une maîtresse, une rock star, des choses simples et d’autres beaucoup moins. Il faut garder sa rêverie, elle permet d'oser et de se projeter dans des univers parfois complètement fantasmagoriques. C’est beau quand la vie rejoint nos rêves, je le souhaite à tout le monde.
Avez-vous des dates prévues prochainement ?
Je vais être en première partie de Stéphanie Sandoz au théâtre de la Tour Eiffel le 4 juin prochain. Ensuite, des dates de tournées vont commencer à partir de début juillet. Et en janvier 2025, je repars sur les routes de France avec une nouvelle pièce, Complètement Space, qui se passe dans l’espace. J’ai hâte ! »
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