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Dominique Fils-Aimé : "La musique me reconnecte avec l'enfant en moi."

Elle peint ses albums avant de les composer, pour imbiber son âme de la couleur qu'elle veut leur donner. Dominique Fils-Aimé utilise l'empathie, la guérison et l'amour comme arme suprême de la rédemption humaine. De ses promenades dans les rues de Montréal, « une ville d’art où de nombreux artistes travaillent ensemble » à sa présence scénique où à chaque plateau elle invite le public dans sa bulle en interprétant ses chansons comme une continuité méditative, Dominique Fils-Aimé invente des lignes musicales pour compléter la mélodie principale. Rencontre.


© Jetro Emilcar

« Dominique, votre quatrième album Our Roots Run Deep est disponible sur toutes les plateformes de streaming. Quelle a été l’étincelle de départ de ce nouvel album ?

A la suite de ma première trilogie écrite (Nameless, Stay Tuned!, Three Little Words) où j’explorais les corrélations entre les émotions, les événements historiques de l’histoire des Noirs et les mouvements musicaux qui en ont découlé, j’ai eu envie de me poser ces questions : où est-ce que je me place ? Qu’est-ce que j’ai envie de partager ? Comment être plus authentique, honnête et vulnérable dans mon présent ? En observant ce qu’il y a autour de nous, on peut en tirer des leçons.


Le clip d’Our Roots Run Deep, réalisé par Miryam Charles, nous invite dans votre jardin. Quelles étaient vos intentions artistiques ?

J’ai travaillé avec des créatrices absolument merveilleuses et inspirantes, autant devant que derrière la caméra. Je me suis entouré de leur créativité et de leur force, on a en commun cette gratitude qu’on ressent par rapport à nos racines, à tout ce qu’elles nous ont amenée et permis de faire aujourd’hui. Me ressourcer avec elles dans un jardin m’a fait un grand bien, on s’est donné l’énergie pour continuer à rêver ensemble d’un monde meilleur.



Que vous inspire la nature ?

Tant de choses. J’ai toujours trouvé drôle les personnes qui disent « je m’en vais en nature », comme si on n'en faisait pas partie alors que c’est tout aussi organique. En observant les plantes sur ces dernières années, deux leçons sont restées avec moi et sont, un peu, les parenthèses de l’album : quand on pense à Our Roots Run Deep, on voit une forêt avec plusieurs arbres individuels mais à côté les uns des autres. Les grands arbres nourrissent les plus petits, le soleil passe à travers les feuilles pour se rendre jusqu’aux racines et nourrir d’autres arbres. Ce niveau de connexion, il est possible de l’avoir humainement. Nous sommes des créatures sociales. C’est important de se rappeler de ce qui nous lie et fait qu’on est plus fort quand on est tous ensemble.


Quel est le fil rouge qui relierait les quatorze titres de l’album ?

Quand on plante une petite graine, on ne lui crie pas « pourquoi t’es pas un arbre ? » On lui donne de l’eau, du soleil, on s’émerveille devant chaque petite feuille qui pousse, et j’ai envie qu’on se donne la même patience et douceur dans notre évolution personnelle et sociale. Se nourrir et être reconnaissant de cet héritage qu’on porte en nous, se réjouir de nos avancées, même quand elles peuvent paraître petites ou anodines, elles comptent.



La musique est votre pouvoir d’unification, elle incite à la rencontre et à l’empathie entre chaque être. Plus jeune, la musique était votre rendez-vous nocturne…

Ma sœur avait une collection incroyable de CD et j’allais, à chaque fois, lui en prendre un pour découvrir un artiste, puis j’allais le redéposer pour en prendre un nouveau en cachette. Ça m’a permis d’explorer plusieurs styles musicaux et de continuer à cultiver cette curiosité. Et puis je suis tombée dans une espèce d’obsession. Quand j’aimais une chanson, je pouvais l’écouter en boucle pendant trois, quatre jours. Certains titres m’ont définitivement accompagné dans différentes périodes de ma vie, comme des trames sonores.


Comment êtes-vous passé de « j’écoute de la musique » à « je fais de la musique » ?

Je ne voyais pas la musique comme une possibilité de carrière. Dans notre société, et dans la culture noire notamment, les arts sont plutôt considérés comme un passe-temps et un choix dangereux, mais je pense que le plus dangereux, c’est de ne pas suivre notre instinct et notre cœur. À partir du moment où j’ai consolidé ces croyances-là, je me devais de l’incarner en suivant mon désir de faire de la musique qui a toujours été ancrée par ma motivation de faire du bien aux gens qui m’entourent, et de laisser une trace positive et empathique derrière moi. Je suis apparue dans ce milieu assez tard et de manière presque improviste. Je travaillais en support psychologique pour les employés, j’étais sûre d’avoir trouvé ma voie jusqu’à me rendre compte que je négligeais mon bien-être, mon repos et mon ressourcement. J’ai commencé à faire de la musique pour me reconnecter avec l’enfant en moi.


© Jetro Emilcar

Le télé-crochet musical La Voix, en 2015, a été votre école. Que retenez-vous de cette expérience ?

Je retiens que, peu importe la structure ou l’industrie, ce sont toujours des humains qu’il y a derrière « la machine » comme certaines personnes l’appellent. Ma peur de l’inconnu m’a poussée à y aller. A chaque fois qu’on confronte nos peurs, elles ont l’air d’être un château alors que ce sont des petites maisons de poupée. Réduire les choses à leur taille réelle fait toujours du bien, on peut puiser du courage là-dedans et cette idée est restée avec moi définitivement.


Avez-vous des scènes de prévues pour votre nouvel album Our Roots Run Deep ?

Notre lancement européen va se faire à Paris au Café de la Danse le 23 novembre. Ensuite, il y aura une tournée dans toute l’Europe dès l’été 2024.


Pour conclure cet entretien, auriez-vous une citation fétiche à me délivrer ?

« La seule constante, c’est le changement. »

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© 2021 par Samuel Massilia.

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