Il a pris le chemin de la comédie quand il a donné pour la première fois la réplique à Juliette Binoche dans le film Alice et Martin d'André Téchiné. Une rencontre avec le réalisateur qui transcende vite le cadre professionnel pour Alexis Loret, qui a depuis tissé son parcours artistique entre télévision et cinéma, devant un acteur épanoui et heureux d'ouvrir les portes de ses débuts. Rencontre.
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« Alexis, on te retrouve ce jeudi dans la nouvelle saison de Léo Matteï sur TF1. Qu’est-ce qui t'a séduit à la lecture du scénario ?
Ce que j’ai aimé avec Léo Matteï, par rapport à d’autres séries, c’est de voir l’enquête tirée sur deux épisodes, ce qui laisse une vraie place à chaque personnage, le temps de vivre avec eux, de voir ce qu’ils traversent. Cela nous permet de servir l’enquête de Léo Matteï. J’ai eu la chance d’avoir Lucie Lucas comme partenaire pour créer cet espace familial. Pleins de conditions ont fait que c’était enthousiasmant et intéressant d’y aller. Et puis, on m’avait aussi dit que le plateau vivait bien. On m’a bien accueilli, l’ambiance était belle, j’ai été très heureux de passer ces quelques semaines avec eux.
Tu interprètes un père de famille aimant, en témoignent les jolies scènes avec ses enfants…
Le frère et la sœur ont été formidables. C’est toujours une ambiance particulière de tourner avec des enfants, il faut trouver de la complicité pour qu’ils fassent abstraction de toutes les contraintes inhérentes à un tournage, ce qui est un challenge. C’est là où on sent que Léo Mattéï est une série bien pensée. Une coach est présente pour les aider, les materner un peu, et ça facilite grandement les choses. L’organisation a été irréprochable.
Quelles images te reviennent du tournage dans la région marseillaise ?
Je la connais depuis pas mal de temps, ne serait-ce qu’avec la série Contact avec Thomas Jouannet pour TF1. La maison qui nous a servi de décor sur Léo Matteï était en périphérie de Martigues, il y avait une ambiance la nuit avec les cheminées des complexes pétroliers. Cette région est riche de tournages, parce que riche de décors et avec des contraintes météorologiques moins compliquées (rire).
Le grand public a pu te découvrir dans plusieurs séries, mais c'est au cinéma que tu as fait tes premiers pas avec André Téchiné. D'où te vient ce désir d'être comédien ?
C’est arrivé un peu par hasard. Je me destinais aux arts appliqués, je voulais dessiner des meubles, j’avais envie d’être designer. J’ai toujours eu une fibre artistique, j’ai d’ailleurs eu mon diplôme en esthétique industrielle. Parallèlement, pour faire un peu d'argent en tant qu'étudiant, j’ai intégré l’agence de mannequin Success. Un jour, on m’a proposé d’aller au casting du film Alice et Martin d’André Téchiné qui cherchait un inconnu. Il est allé voir dans les agences s’il n’y avait pas un jeune garçon avec des velléités d’acteur. Je suis allé au rendez-vous sans trop d’espoir, j’ai passé un premier tour, puis un deuxième et un troisième, jusqu’à me retrouver dans son film. André m’a formé. Le tournage avait duré quatorze semaines, avec des coupures, donc il a presque duré dix mois. On tournait à Paris et à Cahors l'hiver et l'été, il y a aussi eu une partie tournée en Espagne. J’étais avec des acteurs chevronnés, Juliette Binoche venait d’avoir son Oscar, Mathieu Amalric jouait mon demi-frère, Marthe Villalonga ma belle-mère, Carmen Mora (qu’on a pu voir chez Almodovar) ma maman et Roschdy Zem. J’avais la confiance d’André, donc il ne fallait pas se démonter (rires). Ce que j’aime dans ce métier, c'est la synergie entre les talents artistiques et les techniciens, on a besoin d’eux. Réussir un plan de caméra en mouvement, un travelling ou un plan séquence, trouver des axes, c’est une espèce de danse, de magie qui est absolument formidable à chercher ensemble.
Quel lien as-tu gardé avec André Téchiné ?
Je lui suis reconnaissant qu’il m’ait maintenu sa confiance au fil des années. Je n’étais pas vraiment acteur quand il m’a donné ma chance. Je le suis devenu et j’ose l’espérer avec l’expérience. Mon jeu était un peu plus brut, ce qu’il aimait quand il choisissait des acteurs peu expérimentés. André est pour moi un oncle intellectuel qu’on aime retrouver pour partager des discussions diverses et variées. Je le considère comme quelqu’un de ma famille.
Tu entretiens la même relation avec Eugène Green pour lequel tu as tourné dans plusieurs films ?
Ça a été des aventures incroyables. Eugène a une écriture et mise en scène particulière, des procédés filmiques hors d’âge aussi, certaines scènes étaient éclairées à la bougie. Il arrive à avoir des objets cinématographiques qui lui sont propres. C’est aussi la richesse de la création française, on n'a rien de formaté, les auteurs sont très divers. Dès lors qu’une personne a le désir de travailler avec moi, je regarde de plus près et s’il y a de la joie à trouver, je fonce. En plus d’être un grand cinéaste, Eugène est un auteur formidable dont les œuvres sont éditées chez Actes Sud et Gallimard, je vous conseille de le lire !
Pour conclure cet entretien, aurais-tu une citation fétiche à me délivrer ?
« Oublie que t’as aucune chance, vas-y, fonce. Sur un malentendu, ça peut marcher. » Cette phrase de Jean-Claude Duss (Michel Blanc) dans Les Bronzés raisonne un peu avec mon parcours d’autodidacte. Pour celles et ceux qui aspirent à travailler dans le cinéma, ça fonctionne à l’envi et au culot. »
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