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Allan : "Les femmes ont une grande place dans ma vie."

Il jongle avec les mots et les mélodies sans faire tomber la moindre note. À l'écoute des titres d'Allan, on se sent immédiatement transporté dans un univers orchestral, « le piano et le violon sont des instruments qui vont me faire vibrer. » Motivé à donner de la grandeur à sa musique, Allan se laisse guider par ses inspirations et les visages de sa vie, qu'il conjugue au féminin. Sa première session studio, il l'a dédiée à sa maman, puis sa passion s'est mise entre parenthèses, pour mieux revenir avec une déclaration poignante et douce à l'une des femmes qui lui a infusé le goût d'écrire : sa grand-mère. Rencontre.


© Erwan Desmazon

« Allan, ton dernier single Tombé est sur toutes les plateformes de streaming. Comment est né ce titre ?

D’une première rencontre avec Matthieu Tosi, le compositeur de ce son. En arrivant au studio, on a voulu partir sur du neuf, donc j’ai pris la guitare et joué quatre accords que je faisais quand j’avais treize ans. En partant de là, j’ai commencé à faire la mélodie du premier couplet et du refrain. On a senti qu’il y avait quelque chose et avec Matthieu, on est parti sur la composition du son.


Pour toi, comment se déclare cette étincelle qui fait que, justement, on tombe en love de quelqu’un ?

J’ai un rapport très particulier à l’amour. Cette chanson parle des six premiers mois, des débuts dans une relation et qu’on a l’impression que ce sera l’amour de notre vie. Je me suis mis dans la peau des premières fois, des premiers baisers, des premiers je t’aime, des premiers câlins, qui sont très forts. Par la suite, l’amour prend une autre forme.


Un clip est-il en préparation ?

Oui, on est en recherche du lieu, on a quelques petites idées. Petit, je peignais beaucoup avec ma grand-mère, donc j’aimerais me voir en train de composer un tableau représentant l’amour ou la femme dont je parle dans le titre, une sorte de muse.



Les clips Des années et Viens on s’barre ont une allure cinématographique. Quelles sont tes intentions artistiques, visuelles, quand tu les réalises ?

Ma première intention, comme tu l’as bien dit, c’est de toujours avoir une direction artistique très cinématographique. J’essaie de travailler mes textes pour que lorsqu’on ferme les yeux, on soit transporté dans une histoire. L’idée, pour mes prochains clips, est de définir des scénarios, je veux qu’en trois minutes, ils ressemblent à des courts-métrages.


Tombé est un avant-goût de ton premier EP en phase de création actuellement. En attendant, on peut (re)découvrir ton univers musical avec d’autres titres, dont le bouleversant Mamie si tu savais. Comment l’as-tu abordé ?

Pour ma première session studio, j’avais à peu près quinze ans et c’était un son pour ma mère. Ensuite, j’ai fait mes études et la vie a décidé que je m’éloigne un peu de la musique, puis je l’ai reprise avec un son pour ma grand-mère. Ça faisait sens. Les femmes ont une grande place dans ma vie, je me suis toujours senti proche d’elles. C’est grâce à ma grand-mère que j’écris actuellement, elle m’a transmis l’amour des mots et je voulais la rendre éternelle dans le temps avec ce titre. Mes enfants et mes petits-enfants l’écouteront.



Tu évoques les moments de doutes dans Seul, où l'on a l’impression d’être un grain de sable dans la tempête. Comment traverses-tu ces moments de solitude ?

Au début, j’avais un rapport assez négatif, puis j’ai appris à aimer être seul quand je suis tombé dans une solitude positive, celle qui nous fait remettre en question, qui nous fait avancer. Je suis quelqu’un de très solitaire, le soir, généralement, je ne sors pas. Je préfère écrire des chansons, être face à un lac, j’ai appris à être à l’aise avec moi-même.


L’inspiration vient plus facilement ?

Complètement. Je n’écris jamais chez moi ou au studio. Dans l’écriture de mes textes, je puise en moi, mais pour te donner un exemple, avec Des années, je parle du deuil alors que je n’en ai pas vécu. J’ai alors fait un travail de sociologie en questionnant des proches, des amis. Parfois, ça part de ma propre créativité, parfois ça part des autres. Ce juste milieu compose mes chansons.


Quelle est l'histoire derrière ton titre, Aicha ?

Généralement, il est rare pour un jeune artiste d’écrire sur des sujets de violences infantiles, conjugales. En écoutant l’instrumental, ça m’a fait penser à une petite fille qui grandit dans un monde destructeur. Le son fini, je le fais écouter à ma mère, elle me regarde en pleurant et me dit : « c’est exactement ce que j’ai vécu, mais je ne t’en ai jamais parlé. » Il y avait peut-être une transmission innocente. Ce titre racontait son enfance au mot près, sans que je le sache.



Quelle place occupait la musique à la maison ?

Elle n’avait pas forcément une forte présence. Mon père écoutait beaucoup de soul, de funk et de disco. Mes parents ont toujours ressenti mon appétence pour la musique. Il n’y avait plus de places disponibles pour la batterie, donc ils m’ont inscrit à la guitare, au solfège, mais je n’ai pas apprécié. J’ai un problème quand c’est trop scolaire, donc j’ai arrêté les cours et je me suis mis, chaque soir, sur Youtube à apprendre mes premières grilles d’accords. J’ai aimé apprendre par moi-même. Ma tata m’aidait aussi beaucoup. Ensuite, il y a eu l’époque de Rap Contenders, je découvrais le rap, les punchlines, les tournures de phrases, les jeux de mots. Le chant est venu beaucoup plus tard.


D'où te vient ce goût pour les mots, les belles phrases ?

De ma grand-mère. J’ai beaucoup étudié et écrit des poèmes avec elle, on chipotait sur des mots, elle me prenait la tête - dans le bon sens du terme - par rapport à la diction et l’intention avec laquelle je les récitais. Elle m’a aidé à travailler mon concours d’éloquence, forte de ses quinze, vingt ans de théâtre. C’est pour ça que j’en ai fait après.


Dans quel objectif ?

J’ai toujours été fasciné par les personnes qui s’exprimaient extrêmement bien, je pense à Robert Badinter à l’Assemblée Nationale lorsqu’il parlait de la peine de mort. Le tournant, ça a été ma lecture d’un poème de Pierre de Marbeuf qui jouait beaucoup avec les mots : « Et la mer et l'amour ont l'amer pour partage, Et la mer est amère, et l'amour est amer. » Si on regarde bien mes textes, il n’y a pas de rimes, mais des assonances « j’ai trop de peine pour retrouver ma paix, la nuit me rappelle le souvenir de ta perte ». Je trouvais ça fantastique de retranscrire une musicalité, simplement à la lecture.


Pour conclure cet entretien, aurais-tu une citation fétiche à me délivrer ?

Oui, de Peter Drucker, et c’est un peu l’histoire de ma vie : « La meilleure façon de prédire l'avenir c'est de le créer. »

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