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Julia Spinosi : "Le public est très touché par rapport à la voix."

  • Photo du rédacteur: Samuel Massilia
    Samuel Massilia
  • il y a 6 jours
  • 5 min de lecture

Il y a chez Julia Spinosi une façon d’aborder la musique comme on aborde la vie : avec souffle, corps et conviction. Sa voix n’est pas seulement un instrument, c’est une présence, un lieu d’émotion où sa tessiture, ample et souple, transporte celles et ceux qui l'écoutent. Animée par un sens du jeu et une curiosité du vivant, Julia Spinosi, formée au piano avant d’oser la voix, a appris à laisser la musique passer par elle comme un courant vital. Rencontre.


« Julia, tu es actuellement en tournée avec le spectacle Ennio Morricone et le cinéma italien. Comment présenterais-tu ce biopic musical ?

C’est une belle façon de lui rendre hommage. Ces musiques ne sont pas seulement jouées, un acteur italien interprète Ennio Morricone sur scène avec cette magie de la langue, de l’accent. Durant le concert, il raconte les rencontres d’Ennio Morricone avec certains réalisateurs, comment celles-ci l’ont inspiré pour sa musique. Il parle notamment de sa collaboration avec Sergio Leone sur Il était une fois dans l’Ouest et Le Bon, la Brute et le Truand. Chez Ennio Morricone, la musique prend la place du scénario et parfois, il n’y a pas besoin de dialogues car la musique suffit.


Edda Dell’Orso était la soprano des bandes originales d’Ennio Morricone. Pour ce spectacle, quelle a été ta préparation ?

Je connaissais Edda Dell’Orso mais je ne m’en suis pas forcément inspirée. Je me suis préparé comme pour tous mes concerts classiques, avec les vocalises où je vais chauffer ma voix, des graves jusqu’aux aigus. Chez les sopranos, on parle du fameux contre-ut, c’est une note qu’il faut aller chercher. Sur scène, nous sommes quinze musiciens, en plus de ma voix. Quand on m’a proposé de faire ce spectacle, j’ai tout de suite dit oui. J’adore cette musique, elle est très bien écrite et puis Ennio Morricone avait besoin d’une voix lyrique dans sa musique. Elle est aussi amplifiée, ce qui change du classique. On aime l’écouter dans les salles de concert, c’est très immersif et j’ai l’impression d’être dans un film quand je chante avec cet orchestre.


Tu es entouré du Band Original Orchestra et j’ai remarqué un certain mouvement : le pianiste part aux percussions, le chef d’orchestre prend les batteries. Comment s’articule toute la troupe ?

Le Band Original Orchestra est un ensemble de musiciens classiques et de jazz renommés. Plusieurs milieux musicaux se rencontrent. D’un côté, on a un quatuor avec les cordes pour la partie classique, et de l’autre Alexis à la trompette ou encore Julien à l’harmonica, au saxophone, à la clarinette, au piccolo, à la flûte et au train. C’est un orchestre à lui tout seul (rires). Cette troupe a l’habitude de se produire à la Seine Musicale sur des bandes originales de films. En tant que chanteuse, je me sens pleinement incluse avec eux. Dans la mise en scène, je m’assois à leurs côtés, je chante avec eux. Il y a une synergie.


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Quelle place occupait la musique à la maison, dans ton enfance, ton adolescence ?

Je suis née dans une famille de musiciens, donc je n’ai pas choisi (rires). Ma maman est professeure de piano et mon père est professeur de violoncelle au conservatoire de Fougères, à côté de Rennes. J’ai commencé le piano à l’âge de sept ans et ce n’était pas avec ma mère pour des raisons de caractères (rires). Mon petit frère Léo, violoncelliste, est aussi dans le biopic d’Ennio Morricone, car il y a deux casts. Enfin, ma tante est professeure de chant et j’ai des oncles guitariste, chef d'orchestre et clarinettiste. C’était donc une évidence pour moi d’être dans la musique.


Comment s'est fait ton apprentissage du chant ?

J’ai d’abord appris le piano en cursus traditionnel, au conservatoire de Fougères. A dix-neuf ans, je suis entrée au CNSM, à Paris, en tant que pianiste. Je faisais un peu de violon et de danse mais l’année du covid, je me remettais un petit peu en question. Il me manquait une dimension théâtrale. J’ai toujours aimé l’opéra, en plus j’avais fait allemand au collège et au lycée donc c’était bien pratique (rires). J’ai donc pris des cours de chant avec elle et depuis six ans, c’est devenu ma priorité. Être un personnage sur scène, avoir du texte, apprendre la musique d’une autre manière qu’au clavier et que mon instrument soit mon corps et ma voix, ça m’a beaucoup plu. J’ai assez vite trouvé du travail et aujourd’hui, je me sens beaucoup plus chanteuse que pianiste.


As-tu le souvenir d'un cours retenu, d'une leçon apprise ?

Je parlerais plutôt d’un ressenti, de la découverte de ma voix quand j’ai commencé le chant. Cette respiration, ce phrasé musical, ce souffle, ça m’a permis de mieux me reconnecter au piano ensuite.


Ça devait être une sacrée sensation le jour où tu t’es rendu compte du potentiel de ta voix…

Complètement. Ça s’est fait naturellement et rapidement… À mes premiers cours de chant, je n’avais pas ce qu’on appelle le coffre. Je n’avais pas cette puissance. Puis j’ai découvert ces résonateurs, cette musculature. C’est comme un luthier qui construit un violon et qui, au fur et à mesure, devient le témoin de ce qu’il est en train de construire.


Quelle a été ta première scène ?

Je m’en souviens bien. Mon premier concert public en tant que chanteuse, c’était en 2022 pour un autre spectacle d’Ennio Morricone, avec l’orchestre des Pavillons-sous-bois. Lors d’une audition, le directeur de cet orchestre m’a entendu et pour lui, ma voix se prêtait bien à l’univers de Morricone. Avec l’orchestre derrière moi sur scène, j’ai senti une puissance qui m’a portée. Le public est très touché par rapport à la voix. C’était très touchant. Je me suis sentie à ma place. Sur scène, on ne peut pas mentir. Je gonfle mes poumons et me fabrique une espèce de protection, de carapace, qui me renforce face au public.


Quels sont tes prochains projets ?

Il reste deux dates pour le spectacle d’Ennio Morricone, le 8 novembre au Couvent des Jacobins à Rennes et le 16 novembre à la Cité des congrès, à Nantes. Ensuite, j’ai le grand plaisir de faire partie du concert biopic musical sur Michel Legrand, le 25 novembre à la Seine Musicale et le 5 décembre à Enghien-les-Bains. Et puis en mars 2026, je serai en résidence au Quartz, à Brest, pour une création d’opéra avec l’orchestre Ensemble Matheus. J’aurai le rôle de Papagena dans La flûte enchantée numéro 2. Une représentation aura lieu le 14 mars.


Pour conclure cet entretien, aurais-tu une citation fétiche à me délivrer ?

« Une fausse note jouée avec conviction vaut mieux qu’une note juste sans âme » de Beethoven. Pendant deux ans, j’ai donné des cours de piano à des petits élèves et parfois, quand ils me disaient avoir fait une faute, je leur répondais ça. Parfois, on sort de scène et intérieurement, on peut être déçu de ce qu’on a fait. Mais il ne faut pas oublier que la musique adoucit les mœurs et réunit les gens. »

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© 2021 par Samuel Massilia.

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