Dajak : "Ma musique est un exutoire."
- Samuel Massilia

- il y a 14 heures
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Il apporte un nouveau souffle sur la chanson française, entre folk brumeuse et indie rock éthérée. Actuellement sur scène, Dajak enflamme son public avec un show sincère, puissant où la musique touche les cœurs et invite à tout relâcher. Titre après titre, il consolide un univers artistique singulier où les textes et les mélodies se marient parfaitement. Rencontre.

« Dajak, tu étais vendredi soir sur la scène du Makeda, à Marseille. Comment vis-tu cette tournée ?
C’est un rêve éveillé au quotidien. C’est ma première tournée en tant que tête d’affiche, après avoir fait beaucoup de premières parties. L’équipe m’accompagnant sur la route est une famille bâtie sur ces dernières années. On est entre potes et on fait de la musique qu’on aime dans de belles salles où nous sommes bien accueillis. Une petite fatigue s’accumule, le show est assez drainant et intense émotionnellement, mais c’est une bonne fatigue. On fait ça pour les bonnes raisons en défendant une musique indépendante, faite avec le cœur et la passion tous les soirs. Ce n’est que du positif.
As-tu le souvenir de ta première scène ?
C’était en décembre 2014 dans un petit bar à Savigny-sur-Orge, dans le 91, pour une petite soirée sound system organisée avec un pote. Mon public était mes potes du lycée, il devait y avoir une trentaine de personnes et c’était le fire ! Ça a été libérateur pour moi. Je m’étais un peu étonné de m’être senti à ma place sur une scène et derrière un micro. Ça m’a permis de m’exprimer et d’exister d’une certaine manière.

Cette tournée va mener jusqu’à la date du 21 mars 2026 et au concert à l’Olympia…
Tout à fait ! Ce sera la dernière date de la tournée et on l’attend avec grande impatience. Actuellement, on joue dans de plus petites salles partout en France et ça apporte une énergie plus chaleureuse, intimiste et rock, aussi. À l’Olympia, ce sera un show plus grandiose et mis en scène. C'est bien de pouvoir faire les deux.
Que représente cette salle pour toi ?
Mes premières sorties parisiennes quand j’étais au collège et au lycée. En venant de la banlieue, j’allais sur Paris pour voir des concerts, notamment à l’Olympia. C’est une concrétisation, un accomplissement énorme dans la carrière d’un artiste, surtout quand il vient de Paname. C’est un rêve et une fête pour mon équipe et moi.
Ton nouvel album sera disponible le 16 janvier prochain. Quelle présentation en ferais-tu ?
Sur le fond, il est dans la continuité du premier album, Les larmes du soleil, fait tout seul dans ma chambre alors que le deuxième est fait avec des musiciens. Il est 100% live, brut et a quelque chose de plus organique et viscéral que le premier album. On a essayé de capturer des moments d’échange et d’émotions pures. Il est davantage dans une philosophie de l’instant alors que le premier était dans une philosophie de la recherche et de la perfection sonore. Ce deuxième album a un peu plus d’espoir.
En attendant sa sortie, on peut écouter le titre Les allumettes dont le clip est sur ta chaîne Youtube. Quelles étaient tes intentions artistiques ?
Après le premier album, je me suis retrouvé tout seul dans ma chambre à essayer de viser une exigence en matière de créativité qui est devenue malsaine et m’a accompagné d’une solitude et d’un conditionnement qui devenaient invivables. Le clip raconte qu’il existe une vie au-delà des instruments, des câbles et du matos, qu’il y a une vie à vivre en dehors de tout ça. Dans le clip, on me voit tout casser, mettre le feu, et c’est une métaphore pour dire que cette passion - qui m’anime au quotidien - est devenue ma prison pendant un moment. Il a fallu tout laisser tomber pour revenir plus fort et avec un rapport plus sain à la musique.
Cette passion peut consumer ?
Bien sûr. Mon équipe et moi travaillons en totale indépendance, loin des médias, des playlists et des radios. Après le premier album, il y a eu beaucoup de désillusions, c’était difficile de continuer et de trouver la force pour fournir à nouveau tant d'efforts chaque jour alors qu’on se voyait tout seul. J’en ai perdu la confiance en moi, la créativité et gagné plus de culpabilité. C’est un burn out, on peut le dire. Il a fallu rebattre les cartes, redéfinir ce qui était le plus important dans la création, et c’est aussi pour cette raison que j’ai voulu partager cet album avec les musiciens, pour retrouver la sensation de jouer de la musique, partager des sourires, des doutes, créer des beaux moments et être, à nouveau, galvanisé par un esprit de groupe, autant personnellement qu’artistiquement.

Dans quelles conditions naissent tes chansons et quel est ton rapport à l’écriture ?
Le moment de création, d’écriture de texte, de mélodie, de composition pure, est un moment que je passe seul. J’ai besoin de retrouver ma zone de confort, dans ma petite chambre, sans aucune autre énergie, pour entrer en introspection totale et en ressortir. J’essaie de trouver les mots justes sur des émotions plus complexes et ça prend beaucoup de temps. J’ai un rapport très lent à l’écriture, mais ça me va très bien comme ça. Parfois, quand la grâce tombe des cieux, je peux écrire en une soirée et parfois, ça peut prendre plusieurs mois. Une fois ma composition terminée, je fais un guitare-voix, puis un début de prod et enfin, je vais voir les gars avec mon titre composé et écrit. On va travailler les arrangements (batterie, basse) et réenregistrer certaines guitares, trouver des textures et des sonorités intéressantes. Ma musique est un exutoire et une façon de me connecter avec mes émotions.
D'où te vient cette passion ?
Il n’y a pas de musiciens dans ma famille, mais mes parents ont toujours tenu à ce que j’accède à la musique, et je les en remercie. Ils m’ont inscrit très jeune au Conservatoire. Mon père est un grand mélomane, beaucoup de disques tournaient dans la voiture et à la maison. Il est très porté sur la finesse des arrangements et ce qu’il écoutait n’était pas tant les chansons de Michael Jackson ou de George Benson, mais comment Quincy Jones travaillait les sons, les cuivres, etc. Ça a été mon premier rapport à la musique. Et puis, plus tard, mon gros déclic est arrivé au lycée quand je suis allé à ma première soirée sound system, en mode reggae. J’ai vu Raggasonic sur scène et je me suis dit : je veux faire ça dans ma vie.
Pour toi, la musique permet d'accélérer le temps ou bien de le ralentir ?
Bonne question. Je dirais de le ralentir, surtout quand on fait des morceaux de huit minutes (rires). J’ai toujours été inspiré par les ballades. Mon but n’est pas du tout d’accélérer le rythme cardiaque des gens, mais plutôt l’inverse, de faire descendre la pression et de se laisser emporter dans le voyage, de créer une bulle hors du temps, suspendu. C’est aussi une certaine manière d’archiver certains ressentis et états d’âme pour m’en souvenir plus tard. Je kiffe retomber sur mes anciens morceaux et revoir ce que je racontais à ce moment-là, comment je me sentais à cette période. C’est important pour moi de garder une trace.
Pour conclure cet entretien, aurais-tu une citation fétiche à me délivrer ?
Oui, c’est la phrase avec laquelle je conclus tous mes remerciements : « En famille, toujours plus loin et sans compromis. »







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