Elle est une artiste en mouvement. Le parcours de Leanna Chea, entre jeu et réalisation, témoigne d’une envie profonde de raconter, de donner vie à des récits qui traversent les frontières. Devant l’objectif, elle affirme son aisance aussi bien dans le drame que dans l’action, portant des rôles qui résonnent avec force auprès du public. Son engagement se nourrit de ses origines multiculturelles, apportant à chacun de ses personnages une authenticité singulière. Rencontre.

« Leanna, on te retrouve demain dans le film de Stéphane Ly-Cuong, Dans la cuisine des Nguyen. Qu'est-ce qui t'a plu à la lecture du scénario ?
Je connaissais le réalisateur, Stéphane Ly-Cuong, on s’était rencontré sur un tournage dans lequel il jouait l’un de mes gardes du corps (rires). On a accroché tout de suite. Nous avons grandi avec la culture vietnamienne dans laquelle tout passe par la nourriture. Je me souviens qu’on avait parlé de poulet braisé, c’est comme ça que notre amitié a commencé (rires). J’ai trouvé son scénario drôle, touchant, j’aimais aussi le fait que ce soit une comédie musicale. Ma mère m’a bercée aux films de Gene Kelly, de Fred Astaire et, dans un autre registre, des Disney. Ça a beaucoup joué dans ma décision. Et puis le film parle d’une relation mère-fille dans laquelle je me suis retrouvée. Mon rôle est aussi un hommage à toutes les personnes que j’ai rencontrées quand j’étais danseuse.
Quelles images te reviennent du tournage ?
Stéphane est quelqu’un de calme, drôle, bienveillant, toujours à l’écoute, mais aussi exigeant, il sait ce qu’il veut. J’ai pu lui faire des propositions concernant mon personnage, FuFen, qui n’avait pas beaucoup de descriptions sur le papier. Je me suis éclaté avec le HMC (maquillage, coiffure et costume). Pour te donner un exemple, elle est chaque jour habillée avec différents looks. Elle est tellement dans son monde qu’elle est capable (comme je l’ai vu dans la vraie vie) de venir avec une tenue différente tout le temps. C’est une artiste dans l’âme. Elle a besoin de mettre des paillettes dans ses yeux, dans sa vie (rires). Stéphane était complètement d’accord avec ça. C’était un tournage Bisounours, à l’image du réalisateur.
Le film invite à ne pas se mettre de barrières dans la poursuite de ses rêves...
Exactement. Le personnage principal, Yvonne Nguyen (interprétée par Clotilde Chevalier), brave tout pour réaliser ses rêves. La question est de savoir quelles concessions est-elle prête à faire ?
Actuellement se déroule le Nikon Film Festival, un festival de court-métrage d'une durée de 2min20 avec un thème imposé et auquel tu as participé avec le film Coup de Chaud l'année dernière. Ça a été quel exercice pour toi ?
J'aimerais vraiment me lancer dans la réalisation. En choisissant de faire ce métier, c'était pour moi la possibilité de pouvoir défendre des histoires. Et ce n'est pas un exercice facile, car être scénariste, réalisatrice ou comédienne sont des métiers distincts. En participant au Nikon, on a la liberté de faire ce qu'on veut, à moindre coût. Ce n'est pas uniquement ouvert aux personnes produites, tout le monde peut y participer, se lancer des petits défis et je trouve ça génial. Pour moi, le feu, c'était l'amour, le feu intérieur. J'avais envie de parler de deux personnes qui s'étaient aimées très fort dans l'adolescence. C'est souvent quand on est jeune qu'on vit nos plus belles histoires d'amour, selon moi, car on est dans l'insouciance et du coup, on a tendance à les idéaliser. Pour certain.es les années passent, mais les sentiments restent. Dans Coup de Chaud, ils vont se retrouver par hasard dans le métro et vont ressentir à nouveau cette étincelle.
C'est dans le court-métrage Minh Tâm de Vincent Maury que tu fais tes premiers pas en tant que comédienne...
Oui. J'ai été très heureuse de rencontrer Vincent, un réalisateur d'une sensibilité incroyable. J'exprime beaucoup de gratitude d'avoir fait ce projet. Je sortais du Studio Pygmalion et d'avoir la possibilité d'exploiter une telle palette de jeu, c'était du pain béni. J'ai adoré faire ce tournage. Je me suis sentie à l'aise tout de suite. On devait tourner avec un enfant autiste, l'enfant dont la maman avait été la source d'inspiration de Vincent. Je m'étais pas mal préparé avec eux, mais il y a eu des difficultés administratives. C'est Tawan-François Asselin, jeune acteur qui interprète mon fils autiste et il a fait un boulot extraordinaire.

Au théâtre, tu as joué dans les pièces Ça coule de source et Fragments de femmes. Quelle sensation ressens-tu dans le jeu sur scène ?
C'est très particulier. Pour avoir été danseuse, je n'ai pas cette appréhension de la scène. Quand je dansais, je pouvais me cacher derrière un costume ou une artiste, alors qu'au théâtre, on a vraiment l'impression d'être nue, même si on joue un personnage, car on le vit, on lui prête notre corps. Pour le moment, je préfère jouer au cinéma, je m'y retrouve davantage dans la technique et les rôles à défendre. Je reste cependant ouverte aux propositions pour le théâtre car j'aime les challenges. J'adorerais jouer un jour au théâtre dans une pièce de Wajdi Mouawad.
Au cinéma, tu as partagé l’affiche avec Anne Dorval dans le joli film de Jean-Philippe Duval, 14 jours, 12 nuits…
En commençant dans ce métier, je n’avais pas une grande culture cinématographique, même encore aujourd’hui. À chaque fois que je vais au cinéma, je fais mes devoirs (rires). Je me souviens d’avoir vu Mommy de Xavier Dolan et j’étais restée dix minutes après le générique à me dire que je voulais jouer avec Anne Dorval. Deux ans plus tard tombe ce projet de film. Suite à une ciné masterclass que j’avais donnée, la directrice de casting Constance Demontoy, à la recherche d’une française d’origine vietnamienne et parlant la langue, m’a appelé. Je ne me doutais pas de quoi il s’agissait. J’ai alors demandé à mon agent de lancer la candidature, puis on a appris qu’il s’agissait d’un film avec Anne Dorval. Je me dis que ce n’est pas possible ! Je n’y croyais pas. Comme, récemment, avec Astérix et Obélix. Je voyais Vincent Cassel, Marion Cotillard, Guillaume Canet et jamais dans ma vie, je ne m'étais dit que ce serait dans un même film (rires).
Quels sont tes prochains projets ?
Je suis en préparation d’une série Netflix, GIGN, donc retour à l’action ! (Rires) Le tournage commence en février et c’est vraiment passionnant de pouvoir rencontrer des membres du GIGN. Ensuite, j’ai des projets d’écriture. Je n’abandonne pas l’idée de réaliser.
Pour conclure cet entretien, aurais-tu une citation fétiche à me délivrer ?
Carpe Diem. »
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