top of page

Nicolas Bridet : "Au début, c’était très dur de me voir et encore plus de m’entendre."

  • Photo du rédacteur: Samuel Massilia
    Samuel Massilia
  • il y a 2 jours
  • 6 min de lecture

Nourri par le Conservatoire et par une immersion précoce dans le théâtre qui s'est étalée sur vingt ans de sa vie, Nicolas Bridet a gardé des planches un goût certain pour l'exigence mais aussi la simplicité qui permet d'aller droit au cœur du spectateur. Derrière son parcours se dessine une passion constante pour le jeu et une envie d'explorer tous les registres. Rencontre.


© Sébastien Reuter
© Sébastien Reuter

« Nicolas, tu es à l’affiche de Meurtres à Douai samedi 6 septembre à 21h10 sur France 3. Qu’est-ce qui t’a donné envie de jouer dans cet unitaire ?

Tout d’abord la rencontre avec la réalisatrice Pascale Guerre a été déterminante. J’ai tout de suite accroché à sa vision et sa personnalité. La thématique bien sûr, en l’occurence celle du harcèlement scolaire, car j’y ai été confronté de manière indirecte dans mon entourage. Ce sujet me tient donc à cœur. Et puis j’ai une fille qui est au collège et je vois toutes ces problématiques auxquelles les adolescents sont confrontés avec les réseaux sociaux, notamment. Ensuite, j’étais très heureux de travailler avec Sonia. J’ai rencontré une femme extraordinaire, au parcours exemplaire.


Comment s’est passée la collaboration ?

On s’est rencontré une seule fois avant le début du tournage, pendant deux, trois heures dans un bureau de prod à Paris, pour faire une lecture. Ensuite, on s’est vu quinze jours après et c’était moteur, action. On a dix-neuf jours pour faire un 90 minutes, donc il n’y a pas vraiment de préparation en amont. Avec Sonia, il y avait quelque chose de très bienveillant, de respectueux et beaucoup de rigolade. Il y a aussi eu une entraide totale avec toute l’équipe. Si une phrase, une lumière, un déplacement ou que sais-je mettaient l’autre en difficulté, on trouvait toujours une solution pour que chacun se sente à l’aise et puisse travailler correctement.


Quels souvenirs gardes-tu du tournage ?

Ça a été mon premier tournage quasi-exclusivement féminin (réalisatrice, scénariste, chef opératrice, HMC) et c’était une expérience nouvelle très agréable. Il n’y a pas de coup de gueule, mais beaucoup plus de douceur, de respect, de bienveillance. J’ai adoré.


© France Télévisions
© France Télévisions

Le grand public a pu te découvrir au cinéma ou à la télévision. Comment est né ton désir de devenir comédien ?

Je le dois à un maître d’école, en primaire, au CM2. Il nous a fait adapter une BD de Tintin pour un spectacle de fin d’année et comme j’étais le seul blondinet (dans mes souvenirs lointains), j’ai joué ce rôle. Ça devait être dans une salle des fêtes d’un petit village de province et j’avais l’impression d’être au théâtre du Châtelet (rires). À la fin, quand les lumières se sont rallumées et qu’on a salué les parents d’élèves, je me suis dit c’est ça que je veux faire. Ça a été une révélation et je n’en ai plus jamais démordu. Mes parents m’ont rappelé qu’au lendemain de ce spectacle, je leur ai dit que je serai comédien et que j’irai à Paris. Je m’y suis tenu, j’y ai cru dur comme fer en continuant à faire du théâtre par la suite. C’était une évidence.


Ensuite, quand j’ai fait le bac théâtre, j’étais dans un lycée à Orthez, dans le Béarn, avec des professeurs fantastiques. Tous les ans, on allait au festival de Bayonne. C’est là que j’ai pu découvrir une multitude de théâtre de tous les horizons comme celui d’Amérique latine ou du théâtre de rue, c’était phénoménal. Mon amour pour le théâtre est né là. Plus tard, à ma sortie du Conservatoire et la rencontre avec mon agent qui m’a fait passer les premiers castings, j’ai eu la chance de faire à la fois des films d’actions et d’auteurs, de ne pas être catégorisé dans un seul registre. Aujourd’hui, je regrette un peu de m’être éloigné du théâtre, je n’ai pas su trouver ma « famille », mais j’aimerais y retourner dans un futur proche.


Qu’as-tu appris au Conservatoire Supérieure d’Art Dramatique, à Bordeaux et à Paris ?

Tout. Je leur dois énormément. Sans cette école, je ne serai pas là aujourd’hui. J’ai eu Catherine Hiegel en première année et Dominique Valadié en deuxième année. Ça reste parmi les plus belles années de ma vie. Cette école est tellement complète, entre l’acrobatie, l’escrime, la danse, le chant, la musique, tu sors de là avec plus de palettes à ton arc. C’est aussi travailler les œuvres complètes des plus grands auteurs comme Molière et Shakespeare. Une fois que tu sais jouer en alexandrin, en prose ou en vers, tout te paraît plus simple ensuite. Et puis l’exigence des professeurs et les 78 heures de cours par semaine à Bordeaux. Je leur en serai reconnaissant toute ma vie.


Nicolas Bridet et Sonia Rolland dans "Meurtres à Douai" samedi 6 septembre à 21h10 sur France 3 © France Télévisions
Nicolas Bridet et Sonia Rolland dans "Meurtres à Douai" samedi 6 septembre à 21h10 sur France 3 © France Télévisions

Quelles images te reviennent de tes premiers tournages devant une caméra ?

Que ça n’allait pas être si simple. Qu’il fallait adapté son jeu à la caméra. Moins donné qu’au théâtre et plus lui laisser prendre les choses. Au début, c’était très dur de me voir et encore plus de m’entendre. À l’une des premières projections, je me souviens de l'avoir passé caché derrière le siège avant, mon corps accroupi jusqu’aux pieds, avec l’impossibilité de regarder l’écran. C’était une souffrance et heureusement, aujourd’hui, ça va mieux. Il m’a fallu un temps pour l’accepter. Parmi mes premiers tournages, j’ai le souvenir du film avec Philippe Garrel, Les Amants réguliers, qu'on avait répété pendant un an et pour lequel on se voyait tous les samedis avec la bande : Julien Lucas, Louis Garrel, Clotilde Hesme, Joséphine de Meaux, Nicolas Maury, Eric Rulliat, Matthieu Genet et j’en oublie… On sortait de trois ans de Conservatoire et on commençait avec un même film tous ensemble, puis on recevait un prix à Venise. C’était il y a plus de vingt ans et un peu féerique comme époque. Cette innocence qu’on pouvait avoir me manque aujourd’hui.


En 2000, tu co-réalises un premier court-métrage, Maltonius Olbren, primé à Montreuil…

On avait tourné dans un appartement avec mes colocataires, Éric Ménard et Thomas Ratier. On s’était appuyé sur un livre de nouvelles d’un auteur russe ou polonais pour réaliser plusieurs petites histoires. C'était à l'époque des caméras numériques, j’avais acheté une Super 8 aux puces de Clignancourt. C’était du bricolage, on le faisait le soir ou le week-end, en dehors de nos journées de Conservatoire. Et puis on a vu qu’un festival de Super 8 se tenait à Montreuil. Une trentaine de films, d’une durée de trois minutes, a été projeté devant une centaine de personnes le temps d’une soirée. On a gagné à l’applaudimètre. Je m’étais éclaté à le faire, mais de là à dire que je suis réalisateur…


Tu as des envies d'histoires à raconter derrière la caméra ?

Ça a toujours été dans un coin de ma tête. C’est un autre métier. Je sais raconter des histoires à l’oral, mais de là à les mettre sur papier, c’est une autre histoire. L’envie est là, mais le trac est plus présent que le besoin de le faire. J’attends aussi de rencontrer la bonne personne pour m’aider dans l’écriture d’un scénario. Je ne me sens pas légitime pour le moment, même si j’y pense de plus en plus.


ree

Quels sont tes prochains projets ?

Je tourne jusqu’à fin octobre dans le film Mystik, écrit par Raphaël Quenard, Azedine Kazri et Guillaume Scaillet, réalisé par Azedine Kazri et Raphaël Quenard, et produit par Igor Gotesman (Five Dogs) et avec François Cluzet, Emmanuelle Bercot, Ragnar le Breton et Magalie Lépine Blondeau. J’ai un profond respect pour tous ces acteurs. J’ai été flatté de recevoir un appel de Raphaël, je ne pensais pas qu’il me connaissait. En plus, on tourne chez moi, dans le Sud-Ouest. Je suis hyper heureux. Enfin, je viens d’être pris dans une série pour France 2 et HBO, qu’on va tourner en anglais, sur Alice Guy (interprétée par Bérénice Bejo), la première femme réalisatrice au monde, française et qui, au départ, était la secrétaire de Gaumont. Elle volait en cachette des caméras pour réaliser des premiers films de fiction. Ce sont les deux projets de la rentrée.


Pour conclure cet entretien, aurais-tu une citation fétiche à me délivrer ?

« La simplicité n’est pas l’innocence et celui qui accède à la simplicité, c’est par un travail difficile et déchirant sur lui-même. Et alors, simple et nu, il peut parler d’une voix tranquille et dire la vérité. » Pour moi, cette citation d’Antoine Vitez résume au mieux le métier d’acteur. Le jour où l’un de mes profs me l’a dit, elle m’a percuté le cerveau d’une manière à m’en retourner la tête et s’imprégner dans ma mémoire. Je pense que même à 90 ans, si tu me la demandes, je pourrai te la ressortir comme ça (rires). »

Commentaires


Reçois en avant-première les derniers articles !

© 2021 par Samuel Massilia.

bottom of page