Sa participation, dans sa jeunesse, à une école américaine à la pédagogie portée sur « ce qui n’est pas purement scolaire, à savoir les arts et le sport » a participé à son éveil et son appétence pour l’univers du spectacle. Lola Naymark est arrivée sur les planches de théâtre après le cinéma. Dans le 7ème art, Lola a commencé très tôt au côté d'Ariane Ascaride qui « en plus d’être une grande actrice est une amie chère » qu’elle retrouve sur les films de Robert Guéduigian « un réalisateur qui aime les acteurs forces de proposition » pour faire oeuvre ensemble. Rencontre.
« Lola, tu es actuellement à l’affiche du film Et la fête continue ! de Robert Guédiguian. Quelle présentation ferais-tu d’Alice, ton personnage ?
C’est une jeune femme très investie dans une vie citoyenne militante. Alice s’occupe d’une association défendant les mals logés de la rue d’Aubagne. Parmi ses autres activités, elle dirige une chorale associative. J’ai vite connecté avec elle, ce qui n’était pas plus facile pour autant. Alice me ressemble beaucoup, c’est le personnage le plus proche que je n’ai jamais eu à incarner jusque-là. Ma garde-robe a servie pour les costumes du film, il y avait plein d’éléments qui m’étaient familiers. Mais il m’a fallu trouver un décalage pour créer de la fiction et ne pas projeter tout ce que je suis dans ce personnage.
Quelle a été ta première impression à la lecture du scénario signé Serge Valletti et Robert Guédiguian ?
Dans cette équipe, ça fonctionne de manière assez horizontale. On est toujours dans un dialogue franc et ouvert. Ce scénario évoque tellement de sujets qu'il pourrait presque être un document d’archives de la vie dans ces années-là. Les sociologues, s’ils en ont envie, pourraient dans plusieurs années en faire une carte postale de Marseille. Ça m’a beaucoup plu de pouvoir embrasser la vision d’une époque. Et puis j’ai aimé cette histoire d’amour entre Rosa (Ariane Ascaride) et Henri (Jean-Pierre Darroussin), comme le militantisme et l’engagement des personnages, chacun à sa façon, à son endroit. Ça m’a beaucoup parlé.
Le personnage d’Henri est libraire. Quelle lectrice es-tu ?
Cela dépend des périodes et de la disponibilité. Je suis plutôt une grande lectrice de littérature contemporaine. J’aime être embarquée dans des langues. Je joue une performance qui s’appelle Je ne suis pas une sirène dans les lycées et les médiathèques. Le public tire au sort des romans que j’amène dans un sac et accompagnée d'un musicien, j’en lis des extraits.
D’où te vient ce désir d’être comédienne ?
J’ai commencé un peu par hasard quand j’étais enfant. Dans la rue, on avait proposé à mes parents de me faire passer un casting. Ils ne sont pas cinéastes et ont été réticents au début, puis ils ont fini par accepter. Surtout en voyant que cela me plaisait. J’ai fait du cinéma le mercredi, le week-end, pendant les vacances, jusqu’à ce que ça prenne plus de place avec le film Brodeuse réalisé Eléonore Faucher. J’ai eu la chance d’avoir des expériences enrichissantes avec des réalisateurs bienveillants qui savaient travailler avec des enfants. Ça m’a donné envie de continuer. Mon parcours est assez doux, je n’ai pas connu ce moment de prise de décision vertigineuse.
Petite, pour un anniversaire, ta grand-mère t’a emmenée à la Comédie-Française. Quelle place occupait la culture à la maison ?
Mon grand-père est absolument fan de Cyrano de Bergerac ! Il y a toujours eu beaucoup de livres chez nous. On allait au cinéma et ma maman nous emmenait souvent au musée voir des peintures. J’ai eu la chance de baigner dans un univers privilégié avec une grande ouverture d’esprit.
Sur scène, tu as joué dans les pièces Les rues n’appartiennent en principe à personne, Les Liaisons Dangereuses de John Malkovich ou encore dans Le Dindon de Feydeau. Quelle sensation ressens-tu sur les planches ?
C’est extrêmement fort et enivrant. Je joue en ce moment le spectacle Alabama Song, une pièce adaptée du roman éponyme de Gilles Leroy (prix Goncourt 2007) racontant la vie de Zelda Fitzgerald, écrivaine dans les années 20 et épouse de Francis Scott Fitzgerald qui empêchait sa femme d’écrire. Leur couple est mythique aux Etats-Unis, comme Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir en France. On a la chance de jouer cette histoire poignante dans de belles salles pleines. J’ai des partenaires de choix. La présence sur scène est indescriptible, c’est de l’ordre du vertige.
Il y a quelques années, tu réalisais le court-métrage Il était une fois mon prince viendra avec Nina Meurisse et Bastien Bouillon. Comment est né ce film ?
C’est parti d’une petite histoire écrite par mon grand-père et qu’il m’avait offert comme un cadeau dont je pouvais m’emparer. En la réadaptant, j’ai gardé pas mal d’éléments présents dans le film. Le temps de gestation était assez long puisqu’il y avait en parallèle ma vie d’actrice. Dès que j’ai pu concrétiser cet objet, je me suis lancée à fond dedans et j’ai adoré le réaliser.
Le réalisateur finlandais Aki Kaurismäki a été une influence pour ce court-métrage…
Oui, quelque chose ressort de mon goût pour ce cinéaste. J’aime quand la mise en scène s’assume, tout en étant au service de la narration et des personnages. Il y a peu de dialogues dans ce court-métrage. J’ai cherché une mise en scène dessinée avec des plans assez fixes et des cadres posés pour laisser la fantaisie et le burlesque de mes acteurs s’exprimaient. Nina et Bastien ont été merveilleux de drôlerie et de poésie.
Quels sont tes prochains projets ?
Je développe un prochain film en tant que réalisatrice. J’ai l’espoir de le tourner l’été prochain. Sinon, on a terminé le prochain long-métrage de Robert Guédiguian. Enfin, j’ai eu le plaisir de prêter ma voix pour des livres audio de Françoise Sagan. Cela m’a permis de redécouvrir sa façon exquise de décrire les relations (notamment amoureuses) entre les personnages.
Pour conclure cet entretien, aurais-tu une citation fétiche à me délivrer ?
J’ai plutôt un livre à recommander. C’est le premier roman de Léna Ghar, Tumeur ou tutu. Une histoire très forte, d’une force incroyable. »
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