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Sandy Lobry, une cinéaste déterminée !

Créatrice dans l'âme, Sandy Lobry est la définition d'une artiste complète. Que ce soit à l'écriture, à la réalisation ou au jeu d'acteur, Sandy propose toujours des beaux projets bien écrits, avec des sujets intéressants, traités de façon très réaliste. En mai dernier, Sandy Lobry s'est lancé le défi de pointer du doigt les effets néfastes des réseaux sociaux avec une mise en scène originale : filmer du point de vue d'un téléphone. Si l'exercice s'avère compliqué, Sandy a réussi d'un coup de maître son court-métrage « Influenceuse » qui est à visionner en priorité sur son compte Instagram. Rencontre avec Sandy Lobry, une cinéaste déterminée !

© Maxime Stange

« Le 7 mai dernier, nous avons pu découvrir ton dernier court-métrage « Influenceuse » disponible sur Youtube et Instagram. En quelques lignes, de quoi ça parle ?

C'est l'histoire d'une adolescente, Lola, qui passe ses vacances d'été seule enfermée dans sa chambre le nez collé à son téléphone. Assez solitaire et psychologiquement fragile, elle a peu, voire pas d’ami et passe le plus clair de son temps sur les réseaux sociaux, en particulier Instagram. L’objet de son attention et plus encore de sa fascination est une influenceuse star des réseaux sociaux, Miss Billy. Tout doucement, elle va perdre pied en voulant lui ressembler. Le film traite des dérives des réseaux sociaux et de leurs impacts sur la santé mentale des adolescents. C’est une fiction immersive qui se regarde sur son téléphone à la verticale.


Quel est ton regard sur ses applications qui font partie intégrante de notre quotidien ?

Les réseaux sociaux restent professionnels chez moi, je m’en sers de vitrine pour partager mon travail et découvrir celui des autres. J’y expose le moins possible ma vie privée. Ma génération n’a pas grandi avec les réseaux sociaux et j’imagine que c’est plus simple pour nous de les garder à bonne distance. Les ados d’aujourd’hui, eux, ont grandi avec, ils font partie intégrante de leur vie, quel ado n’a pas son propre téléphone maintenant ? C’est d’ailleurs en voyant passer plusieurs faits divers tragiques les concernant et impliquant les réseaux sociaux qu’Influenceuse a commencé à germer.



J’avais également lu une étude qui pointait du doigt Instagram comme étant le réseau social le plus nocif pour la santé mentale des jeunes. Ça a été mon point de départ, comment à cette période charnière et tellement déstabilisante qu’est l'adolescence on arrive à se construire quand on est sans cesse confronté à des images de vies et de physiques idéalisés et souvent fake. À notre âge on a le recul nécessaire pour comprendre que ce qu'on voit n’est pas la réalité mais une mise en scène de réalité, mais à 12, 13, 14 ans ? En plus des injonctions de beauté très présentes sur les réseaux sociaux, je voulais aussi aborder l’addiction et donc souvent l’isolement qu’ils peuvent engendrer.


Court-métrage intégralement réalisé avec un téléphone, la mise en scène a pourtant été difficile ?

Quand j’ai commencé à avoir les contours de mon histoire je me suis très vite dit que la meilleure façon de la raconter serait du point de vue du téléphone de l'héroïne, la mise en scène et le format au service de mon scénario. Mon personnage passe le plus clair de son temps sur son téléphone, avec une mise en scène classique on aurait vite fait le tour…


Après l’écriture du scénario, il a fallu voir si c’était possible et réalisable en terme de motion design. Pour une immersion totale du spectateur je voulais que tout soit exactement similaire à un téléphone, et ça au détail près. On ne s’en rend pas forcément compte mais il y a un travail de dingue derrière sur l’animation, il a fallu recréer toutes les interfaces notamment (Instagram, Youtube, le téléphone..). Et pour ça j’ai eu la chance de bosser avec Antoine, une pointure, qui a travaillé dessus pendant des mois. Je crois qu'à la fin il me maudissait (rires).


© Jean-Yves Durupt

Casting cinq étoiles avec la brillante Alix Benezech et la très prometteuse Lauréna Thellier. Comment s'est passé le tournage ?

Nous avons tourné sur deux jours avec plusieurs répétitions en amont. La difficulté étant que nous tournions avec un téléphone et en plan-séquence pour chaque scène. Tourner avec un téléphone c'est une chose mais tourner du point de vue du téléphone ça en est une autre. Pas de coupe ou de montage pour nous sauver, ce qui impliquait de connaître parfaitement son texte pour les comédiens et d’être extrêmement à l'écoute notamment sur les scènes de FaceTime.




Pour ces séquences justement les comédiens se donnaient la réplique en off et devaient garder exactement le même rythme pour que nous puissions superposer les images ensuite et avoir la sensation qu’ils se répondaient. De plus je définissais en amont le cadre avec eux mais ensuite ils étaient leurs propres cadreurs en quelque sorte puisque le téléphone était entre leurs mains. Ils devaient regarder l’objectif et se voyaient pendant qu’ils jouaient, ce qui est à l’opposé de ce qu’on leur demande d’habitude. Ils ont assuré, le film leur doit beaucoup !


Il y a sept ans, tu donnais naissance à ta propre chaîne Youtube "La Rousse" avant de devenir "Sandy L". En créant cette chaîne, tu as décidé de t'offrir une liberté artistique totale ?

Au commencement c’était surtout pour m’offrir de jolis rôles, en comédie principalement. J’avais tourné beaucoup de drames en télé notamment mais très peu voir pas de comédie et c’est quelque chose qui m’attirait vraiment. Au-delà de ça j’avais une réelle envie d’écrire et de réaliser. Quand j’ai créé la chaîne je n’étais absolument pas cliente de Youtube, je voulais simplement y déposer mes premières réalisations pour pouvoir les envoyer aux amis et professionnels.


La première vidéo a fait le « buzz » comme on dit, elle a été relayée par plusieurs médias et les vues ont rapidement grimpé. C’est à ce moment-là que j’ai découvert l’écosystème Youtube et surtout le fait que ça pouvait être un formidable laboratoire pour la jeune auteure/réalisatrice que j’étais.


© Paul Robein

J’ai eu la chance d’avoir une équipe qui m’a fait confiance et m’a suivie au tout départ quand il n’y avait pas de budget et qu’on était véritablement dans le système D et la débrouille. Je me souviens d’ailleurs de ma petite soeur alors âgée de 12 ans qui tenait le micro sur la toute première vidéo. Puis les choses se sont professionnalisées, c’est grâce à la visibilité donnée par ma chaîne que j’ai pu signer avec Canal + pour une série web entre autres ou encore travailler sur de la fiction avec des marques.


Aujourd’hui malheureusement il est très difficile de faire de la fiction sur Youtube, ce n’est pas le contenu que la plateforme met en avant et je dois dire que sans l’aide du CNC me concernant je n’aurais pas pu produire un film comme Influenceuse et l’offrir en libre accès sur Internet. Youtube a été un formidable tremplin duquel je m’éloigne maintenant pour grandir. C’est là que j’ai compris que plus que jouer ce que je voulais réellement c’était écrire et réaliser des films.


© Rudy Waks

Des courts-métrages avec des scénarios bien huilés et une chute qui tombe toujours au bon moment et qui est souvent surprenante. Comment as-tu appris à bien gérer les notions de dramaturgie ?

Que ce soit pour la réalisation où l’écriture de scénarios je suis plutôt autodidacte à la base. J’ai commencé à écrire suite à un événement personnel que j’avais besoin (comme beaucoup d’autres) de coucher sur le papier. Je me suis lancée à ce moment là dans l’écriture d’un long-métrage sans avoir aucune notion de dramaturgie et forcément à la moitié de mon histoire je me suis retrouvée bloquée puisque je n’en avais pas la structure.



J’ai donc décidé de me former, en lisant beaucoup d’ouvrages d’écriture de scénarios et notamment “la dramaturgie” d’Yves Lavandier qui est pour moi la bible quand tu décides d’écrire. J’ai appris ce qu’était la structure, la caractérisation des personnages, les conflits, le climax….


J’ai aussi beaucoup fait lire mes scénarios à des amis scénaristes pour avoir leurs retours, ce qui n’a pas toujours été facile au début. Je voulais qu’ils soient, pour que je puisse avancer, le plus honnête possible et forcément quand tu as passé des jours et des jours sur un scénario c’est parfois difficile d’entendre les critiques négatives. Mais c’est comme ça que j’ai appris et surtout que j’ai compris qu’un scénario c’était beaucoup de réécriture. Que le premier jet parfait n’existe pas.


© Caroline Fauvet

Pour moi le scénario c’est le squelette d’un film, c’est le plus important. Tu peux avoir de magnifiques images, une réalisation dingue mais sans une bonne histoire tu perds les gens, c’est vide.


Quels sont tes futurs projets ?

Au niveau des tournages, j’en ai pas mal qui sont en stand-by ou même pour certains annulés. Le confinement m'a permis d'écrire, de prendre du temps. Je développe deux séries, une que j'écris seule de 8x30 minutes et une autre en duo de 6x52 minutes. Et je prépare aussi deux courts-métrages, un dans la comédie et l'autre dans le thriller. Je me dirige de plus en plus vers l’écriture et la réalisation, c’est ce qui me fait le plus vibrer, même si je continue à jouer avec plaisir.


Que peut-on te souhaiter pour le futur ?

D’avoir les miens près de moi et en bonne santé. De faire des films, d’écrire, de réaliser et de prendre toujours autant de plaisir à le faire. »

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